13 Février 2024
J19 en Tanzanie, Dimanche 28 janvier, J220 de voyage
On hésiterait presque à rester traîner là, au Mountain Bikes House, à essayer de revoir quelques minutes le Kilimandjaro comme on a eu la chance hier, mais il faut y aller. On a repéré le Coffee Tree Campsite juste avant le parc national du Kili. Ca monte bien les derniers kilomètres : 700 mètres de dénivelé sur un petit 5km.
Le camping propose des visites guidées dans le secteur. On opte pour le combo waterfalls, coffee and caves. Le guide vient nous chercher à 14h30 en voiture avec chauffeur. Tiens, encore un véhicule local dont le compteur ne fonctionne pas.
On commence par les cascades de Ndoro. Ca descend raide pour y aller et les marches sont super hautes. Pas rapport aux petites jambes de Guilhem, ça doit le faire travailler deux fois plus 😅 mais il ne se plaint pas, il tient la main du guide, il en est tout fier. L'endroit est joli, c'est très vert. Mais on reste très peu de temps en bas.
Notre guide est cependant très sympa, et nous explique régulièrement des petits trucs. Par exemple, à un moment où l'on pensait juste passer à côté du bush, à y bien regarder c'est finalement un mélange de plantations de bananiers et de café, au milieu d'autres arbres. Il y a plusieurs variétés de bananes pour différents usages : fruits à consommer tel quel, banane pour la bière ou le vin, pour cuire en toast...
Quand on remonte de la cascade, les gars de l'accueil du site nous attendent avec des caméléons. Elyone est très contente d'en tenir un, quand petit chat te le balance presque par terre en sentant ses petites griffes 😅 Les caméléons sont d'une grande aide dans les plantations de café où ils mangent les insectes.
Ensuite c'est parti pour la ferme de café justement. Ici pousse de l'arabica, qui a besoin de l'humidité et de la fraîcheur de cette altitude, contrairement au robusta qui a besoin du soleil des plaines.
Les arbres à café peuvent devenir très grands s'ils ne sont pas taillés. Une fois la graine plantée, il faut attendre 4 ans avant la première récolte. A l'apparition des fleurs, il faut patienter encore trois mois avant de pouvoir le cueillir, quand le grain est rouge.
Dans cette toute petite exploitation, le café est préparé manuellement de A à Z. Après récolte, les grains vont dans une machine où tu tournes une espèce de râpe qui te retire cette première peau rouge. Le café tombe alors dans un bac d'eau où il passe 24h pour être lavé. Ensuite, il reste une peau beige. Pour la retirer, une fois séché, direction le mortier et c'est parti pour pilonner en musique 🎼Twanga-twanga🎶... le pilon n'est pas léger !
Tu mets ensuite tous les grains et la peau sur un plateau tressé : tu secoues vers le haut et les peaux s'envolent.
C'est parti ensuite pour la torréfaction : dans une marmite déjà chaude, tu balances les grains de café sans rien d'autre et tu n'arrêtes pas de remuer pendant 10 minutes. Le grain qui était clair brunit jusqu'à cette jolie teinte que l'on se représente en pensant au café, et quand quelques "pop" se font entendre, à la manière du pop-corn mais sans que ça saute partout, c'est prêt.
On met quelques temps sur un plateau recouvert, hum la fumée qui s'en dégage a un doux parfum, un vrai régal olfactif. Et aller hop, à nouveau dans le mortier ! 🎼Saga, saga, saga 🎶(moudre) La musique t'aide à garder le rythme quand tu frappes le pilon.
On jette ensuite la poudre dans l'eau bouillante, 4 minutes. Pas de filtre : le café est devenu si fin qu'il coule au fond (d'ailleurs quand on en préparera plus tard dans la cafetière italienne des copains, on a brulé le café, devenu trop compact, car l'eau ne passait pas !)
Pendant qu'il chauffe, on prépare une sucrerie pour les enfants car on a dit qu'ils préféraient le chocolat😅 : nous voici à mixer sucre roux, lait en poudre et café ! 🎼Saga, saga, saga🎶... une cuillère dans la paume de la main et... plus qu'à se régaler !
Deux écoles se distinguent cependant : Tom notre guide nous conseille de savourer lentement, quant à la jeune femme, elle te dit 1,2,3 et tout dans la bouche ! Dans tout les cas, c'est vrai que c'est bon et le côté archi sucré te fait effectivement penser à un ersatz de cacao en poudre.
Ensuite, on boit notre café tranquillement puis la guide du site vient nous donner les premières explications concernant les conflits entre chaggas et masaïs il y a 200 ans, préambule à la visite des caves. C'étaient deux peuples très différents. Les chaggas étaient monogames, vivaient dans les highlands (sur la montagne), mangeaient peu (ou pas) de viande et étaient sédentaires. Les masaïs, à peu près tout l'inverse : polygames se nourrissant principalement de viande et de lait, peuple nomade vivant dans les plaines.
Sauf qu'à la saison sèche, ses derniers avaient besoin des pâtures vertes des alpages pour leurs troupeaux. Ils ont bien fait quelques transactions du genre peau de chèvre contre des fruits mais cela a surtout donné naissance à de terribles conflits et les chaggas en sont venus à construire des grottes souterraines pour se cacher lors des raids masaïs.
Là où nous sommes, 62 familles s'y cachaient. D'abord, on entre dans un sas où un gardien surveillaient l'arrivée des masaïs. Pour les accueillir, il avait le choix entre deux armes : un lourd bout de bois pour tuer en cas de nombre important d'assaillants, ou s'ils n'étaient pas trop nombreux un plus léger pour assommer, interroger et s'en servir ensuite comme esclave.
On arrive ensuite à la pièce commune : cuisine et place pour une ou deux vaches. Celles-ci mangeaient une sorte de terre-roche volcanique riche en nutriments mais salée, ce qui la faisait beaucoup boire et ensuite beaucoup dormir, donc elle ne faisait pas trop de bruit 😄
Après, il y a une toute petit pièce circulaire pour chaque famille avec à chaque fois un conduit d'aération. Sous celui-ci, ils mettaient une marmite avec de l'eau. Ainsi, si les masaï trouvaient le trou à la surface et lançaient un caillou dedans, ils pouvaient croire que la rivière passait là en entendant le bruit de l'eau.
Car en effet, l'entrée ne se situe qu'à 1,2km de la rivière où nous avons vu la cascade. D'ailleurs, pour se débarrasser des corps, ils nous racontent qu'ils les découpaient et les jeter ensuite à l'eau, sympathique !
De l'autre côté, 4km de tunnels sur lesquels se répartissent les nombreuses familles. Aujourd'hui, les arbres ont repris leurs droits avec leurs racines et les tunnels ne sont plus accessibles.
Heureux de retrouver la surface, nous allons voir une maison traditionnelle chagga. Ba oui, ils ne vivaient pas toujours sous terre ! Autour d'abord, il y a une haie d'ananas. Leurs feuilles piquantes et coupantes sont une barrière naturelle pour empêcher serpents et petits animaux désagréables de s'approcher. On voit aussi des tomates sauvages (un arbre!), du tabac, et un yucca. Ils utilisaient les feuilles de celui-ci pour communiquer : une feuille pliée coincée au-dessus de la porte = tu peux entrer, une feuille nouée = ne pas déranger (ou l'inverse😄).
A l'intérieur sur la gauche il y a d'abord les lits en hauteur. Le père dort le plus près, en cas de danger, et est séparé des enfants et de sa femme par une fine cloison de branchages. Ici aussi, les codes secrets s'invitent : mari et femme claquant une des branches une ou plusieurs fois pour s'inviter à se rejoindre, ou dire de patienter.
Les animaux prennent quasiment la moitié de la place : oui chèvre et vache sont à l'intérieur de la case. Pas de poules. Le feu est au milieu et il y a un étage sur toute la surface pour le stockage des avocats, bananes, etc... Il y a des calebasses de toutes tailles, une pour la bière de bananes, et le verre du père deux fois plus gros que celui de la mère 😅
Vraiment, c'était un super après-midi de visite. Seules les cascades nous ont déçues par rapport au prix car chaque visite était au prix de 75000shillings tanzaniens (25000/ad, moitié prix enfant). Le coup de cœur pour tous, même les enfants, a été de faire nous-même notre café. Café du kilimandjaro s'il vous plaît. On rentre à 18h au camping, sortie de 3h30 fatigante mais intéressante et passionnante !
Lundi 29 janvier
Pendant que nous faisons école, Bruce jette un oeil aux panneaux solaires qui ne produisent plus rien depuis plusieurs jours. Il s'avère que c'est le même problème qu'en Namibie mais sur l'autre borne : la connectique en forme de trident a fondu côté négatif.
Au moins, on sait ce qu'on doit chercher dans les petites boutiques d'électricité en prenant la route. On descend en direction du sud, pour rejoindre les amis à Irente Farm, dans les Usambara Mountain. On mange en chemin omelette-frites achetée en bord de route. Ca roule bien, et nous traversons de grandes cultures sur lesquelles on s'interroge cinq minutes : ce sont pas des palmiers, pas des aloes... non, ce sont des cisales (on le saura plus tard grâce à Mike). Plantes à partir desquelles ils font de la vannerie : panier, sac, tapis...
Les derniers kilomètres montants dans la montagne sont très jolis. Le camping est juste à l'entrée de la forêt, c'est cool. Les enfants sont super contents de se retrouver et redorme ensemble comme la première fois (les trois grands dans Ruben, les deux petits dans la tente de toit).
On se lance aussi dans la découverte gustative du fruit du jacquier... Et bien c'est pas fameux ! Déjà, ce fruit sent mauvais, il est très gros mais seule une petite partie caoutchouteuse se mange et elle a un semblant d'arrière-goût de banane... Vraiment, on recommande cette découverte culinaire ! 🤣
Mardi 30 janvier
Ce matin, école collective où chacun supervise la classe du dessous, c'est drôle. Elyone et Gaston révise ensemble leurs multiplications avec un jeu de cartes.
L'après-midi, on descend visiter la ferme. On espérait un peu voir où ils fabriquent leurs fromages mais nous resterons sur le pas de la porte pendant les explications. Ils font entre autre de la mozzarella, du gouda nature ou parfumé.
On va ensuite voir le bâtiment des ruches : oui elles sont enfermées pour ne pas se les faire voler. Avec évidemment des ouvertures pour que les abeilles sortent butiner. Nous ne voyons pas non plus l'intérieur. Puis les cochons destinés à la vente avec un grand succès des porcelets auprès des enfants. Et l'atelier de confiture : bâtiment dans lequel de gros frigos se trouvent pour conserver les fruits, et cuisine extérieure où ils placent les différentes marmites quand il y a besoin d'en refaire. Ils en font à la mûre, l'orange, la mangue... (Nous achèterons des pots de mûres, excellent 😉 )
On doit encore patienter un peu avant la traite des vaches à 16h alors on descend avec Mike notre guide jusqu'à la nouvelle plantation d'avocatiers. Ces nouveaux arbres vont rester plus bas que ceux qu'ils avaient alors et qui devenaient très hauts s'ils n'étaient pas taillés. Une fois plantés, il faut attendre 2 à 4 ans pour la première récolte. Ca donne ensuite tous les ans.
En chemin, Mike nous explique qu'en plus de la ferme, il y a trois institutions à Irente : une école pour personnes malvoyantes ou aveugles, un orphelinat et un centre pour personnes handicapées physiques et/ou mentales. La perception du handicap a évolué, il y a eu beaucoup de travail d'informations et les personnes handicapées ne sont plus forcément vues comme "maudites".
D'ailleurs en Tanzanie, nous voyons énormément de panneaux de signalisation "attention" avec un symbole pour malvoyant, sourd, fauteuil roulant etc...
Finalement arrivés à la plantation d'avocats, il se met à pleuvoir sérieusement. On ne traîne pas pour le retour et le temps de tout remonter, on est bien bien trempé ! Pas de traite du coup, on va tous se sécher au camp.
Mercredi 31 janvier
Départ à 9h pour la journée randonnée ! Nous retrouvons Mike, notre guide de la veille. On commence par la forêt cultivée : plantation d'eucalyptus et camphriers, dans lesquelles on trouve des caméléons, enfin le guide les trouve pour nous !
Il nous fait sentir et goûter différentes plantes, rarement fameuses mais aux vertus médicinales (pour les dents, les vers, les maux de ventre...)
On grimpe dans les hauteurs du village par de tout petits chemins. C'est parfois bien raide, il faut vraiment être motivé pour venir y planter et récolter son maïs... La fin de la montée se fait par des escaliers qui m'achèvent, on voit que ça fait longtemps qu'on n'a pas marché 😅
Mais l'arrivée est belle : nous voici sur un des sommets des montagnes Usambara, à 1800m d'altitude et c'est super chouette. Retrouver un petit courant d'air fait énormément de bien, on avait chaud au milieu des arbres. On pique-nique là-haut.
Puis c'est reparti pour la descente. Les enfants galopent devant, ça aide d'être avec les copains ! On s'arrête visiter les German Caves : en fait un tunnel boueux de quelques mètres où pendant la guerre, les allemands cherchaient du bauxite, roche sédimentaire riche en fer et en aluminium. Il n'y a pas de lumière alors on s'éclaire comme on peut avec nos téléphones et on observe les chauve-souris sans trop faire les malins quand même 😅
Ensuite, c'est la Rain Forest du Maganga Parc. La forêt vraie, sauvage. Aux arbres gigantesques, aux troncs étranges, aux fougères qui touchent le ciel, aux petits cours d'eau qui traversent... c'est très beau.
Quand nous revenons au niveau du village, 5 motos nous attendent. C'est parti pour le retour en boda-boda, à trois dessus, sans casque, tout va bien. Les petits chemins sont parfois bien escarpés mais les pilotes gèrent bien. Guilhem s'éclate et papote tout du long. Il est 15h30 quand on rentre au camping. C'était une super journée et on revient bien à plat... enfin les parents ! Les enfants eux se sont mis en tête de dormir dehors cette nuit alors c'est parti pour la construction d'une cabane.
Mais la journée n'était pas vraiment fini, les Highfive nous motive pour une partie de dodgeball (similaire à la balle aux prisonniers). Cette famille veut ma peau de grande sportive, c'est pas possible 😅 On s'éclate tous ensemble, c'est vraiment super.
Et le soir, pas un de nous côté adulte n'a cru que les trois grands dormiraient effectivement la nuit dehors. Mais armé chacun de leur sac de couchage, sous leur cabane-table ramenée dans la plaine, ils l'ont fait. Ils n'ont pas eu froid malgré l'humidité, et ça leur fera certainement un beau souvenir. Trop chouette 🙂
Jeudi 01 février
Matinée école, rangement et douche. On passe au marché de Lushoto refaire un plein de fruits et légumes avant d'attaquer les pistes pour redescendre des montagnes autrement que par la tar. A midi, les enfants jouent dans la rivière et on dégonfle les pneus pour être moins secouées sur les pistes caillouteuses. On traverse quelques petits villages. On a de superbes paysages.
L'idée première était de faire du wild dans les montagnes mais on se fait rapidement une raison : les rares endroits plats sans arbres sont habités, il y a du monde partout. Tant pis, nous allons à un camping vers Mambo, avec une vue absolument magnifique sur la vallée. C'est un petit peu couvert mais on voit les montagnes au loin. Il y a trois jours, ils ont pu voir le Kili d'ici, aurons-nous cette chance ?
En fin de journée, nous voyons de manière impressionnante les nuages arriver de l'est et courir sur la montagne juste sous nos yeux, poussés par un vent frais venant de l'océan Indien.
L'orage gronde, la pluie va arriver. Vite, les enfants mangent avant d'être mouillés. Nous, on n'aura pas le temps de savourer comme il se doit la purée faite maison et la bonne viande que les copains ont ramené de Dar Es Salam, on mange précipitamment avant de courir aux abris. Ensuite, les enfants font soirée dessin animé dans la tente pendant qu'on quinche dans Ruben, très belle soirée malgré la pluie 😉
Vendredi 2 février
A 7h, de gros nuages sont encore là. Au cours de la matinée, ils passeront et seront remplacer par d'autres en nous permettant parfois d'apercevoir la vallée et le lac en contrebas. Je me mets à jour dans mon carnet de notes en profitant de la jolie vue. Aujourd'hui, on doit redescendre de ces belles montagnes alors profitons-en encore un peu.
Fin de matinée, c'est parti. La piste est en bon état. La vue est magnifique. On roule quelques instants sur une crête avec un paysage dégagé de chaque côté, c'est grandiose.
C'est drôle de voir que sur les arrêtes des montagnes, les maisons sont alignées. Ils ont exploité chaque petite parcelle plate.
La descente se fait bien. Le plus raide étant parfois les têtes d'épingle. Pas de grosse difficulté et on baisse très vite en altitude. En bas, on se trouve un coin où pique-niquer tous ensemble avant de se séparer. Ils vont monter au Kenya tandis qu'on part en direction de l'ouest. On n'a pas très envie de se séparer mais nos voyages continuent !
On reprend 30 km de bitume avant de bifurquer sur une nouvelle piste. C'est une route un peu traître : très agréable mais d'un coup tu as de gros trous de dingue ! Alors, à force de freinages intenses et de secousses dans les trous inévitables, on en vient à rouler à 50km/h. Ca va être long.
On finit par se poser dans le bush pour la nuit, un peu déçu de ne pas avoir avancer d'avantage en direction de Kondoa. Un berger passe puis revient avec des gens du village. Au début, on ne peut soi-disant pas rester à cause des lions et éléphants. Moui... Un peu sceptique on leur dit que de toute façon quand il fera nuit on sera dans notre camion "à l'abri". Le chef arrive, avec tous ses "my friend", il semble comprendre quand on lui dit que pour nous c'est plus dangereux de conduire fatigué avec la nuit qui tombe, et qu'on veut juste se reposer. Ils restent encore un moment à observer nos moindres faits et gestes puis nous souhaitent une bonne nuit. Bonne oui, mais chaude avec une température restant à 25°. La fraîcheur des montagnes va nous manquer.